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Contribution de N°27 - Jean-Louis LAVOISARD

 L’infarouge, le Big Bang et la SAT

A l’occasion du centenaire de Jean TURCK qui joua, en France, un rôle très important dans le développement des applications du rayonnement infrarouge dans le domaine militaire et industriel, nous nous sommes demandé quand et comment les chercheurs français s'étaient intéressés à ces rayonnements dans le domaine purement scientifique de l’astronomie et de l’astrophysique. Cette contribution résulte de la synthèse des informations et textes provenant de Pierre LENA, Bernard CHRISTOPHE, Michel SIRIEIX et moi-même.
 
1 - Généralités
 
En fait, lors du demi-siècle écoulé, l’astrophysique fut l’une des sciences les plus fécondes en découvertes. Cela a trois raisons principales :
  • la richesse de notre vaste univers. Exoplanètes, trous noirs, lentilles gravitationnelles et matière sombre, supernovae et pulsars, ondes de gravitation et molécules interstellaires constituent des défis posés à la physique, la chimie voire la biologie,
  • la floraison de nouveaux instruments d’observation avec les satellites affranchis de l’obstacle atmosphérique, les sondes explorant le système solaire, les télescopes optiques terrestres géants et les réseaux de radiotélescopes aux dimensions de la Terre,
  • l’abandon de la photographie au profit de rétines électroniques, capables d’analyser le rayonnement de l’univers dans presque toutes les gammes d’ondes et d’énergies, sauf aux radiofréquences.
Vers 1934 le professeur André LALLEMAND, qui sera directeur de l’Institut d’astrophysique de Paris, s’intéresse à la détection des rayonnements lumineux ou non, essentiellement à l’aide de photomultiplicateurs qu’il contribue à perfectionner. A partir de 1937, la caméra « Lallemand », résultat de ses recherches, devient un instrument utilisé dans la plupart des observatoires.
La réalisation et le polissage de miroirs progressent constamment (inauguration en 1949 du télescope du Mont PALOMAR muni d’un miroir de 5 m de diamètre). Les années 1960 voient le développement massif des radiotélescopes, qui se présentent sous la forme d'immenses antennes de métal. Ils permettent d'avoir accès à des rayonnements de longueur d'onde de l'ordre du millimètre et au-delà.

Pourtant, c’est notre environnement immédiat qui va faire l’objet des recherches les plus actives. L’observation des éruptions solaires précédemment identifiées par Bernard LYOT, les ceintures de VAN ALLEN découvertes en 1958 font l’objet de la plupart des recherches en vue de comprendre le fonctionnement de notre Soleil et l’interaction du « vent solaire » et du rayonnement cosmique avec le champ magnétique terrestre.
Faute de pouvoir utiliser le rayonnement de la surface du Soleil, on développe les coronographes et on exploite soigneusement toutes les éclipses totales de Soleil (mai 1965, juin 1973)
 
A la SAT quelques ingénieurs soucieux de doter celle-ci des techniques et technologies nouvelles, n’hésitent pas à étudier la production de cellules photovoltaïques à haut rendement ou l’utilisation des premiers circuits intégrés en vue de développer des équipements spatiaux comme les générateurs solaires et les codeurs de télémesure pour de nombreux satellites scientifiques (D1 et D2 du CNES, ESRO 1, HEOS, TD1 de l’ESRO/ESA). Ces investissements techniques s’avéreront globalement utiles, notamment pour la fourniture d’équipements destinés à des satellites météorologiques et de télécommunications, mais les activités correspondantes seront stoppées en 1975 faute d’un marché mondial insuffisant.
On assiste, d’autre part, au développement d’équipements scientifiques de mesure embarqués à bord de fusées sondes puis de satellites pour analyser les flux de particules de toutes énergies rencontrés autour de la terre (NASA, ESRO/ESA, ..).
Si certains astronomes et astrophysiciens pensent à s’affranchir de la présence de notre atmosphère en construisant des télescopes et analyseurs spatiaux, d’autres tel Antoine LABEYRIE misent dès 1975 sur l’utilisation de réseau de télescopes au sol et l’interférométrie pour disposer d’outils toujours plus performants. Enfin en 1989 la mise en œuvre de l’optique adaptative ouvre de nouvelles possibilités.
 
2 – L’infrarouge
 
2.1 Le pionnier
Dans les années 1960, la recherche spatiale se développe en France, l’étude du Soleil devient un sujet très important. Pierre LÉNA, sortant de l’Ecole Normale Supérieure, agrégé de physique est assistant à la faculté des sciences de PARIS-ORSAY. Il s’intéresse d’abord au Soleil et se demande ce que rayonnent, d’une manière plus générale, les astres et comment le mesurer. Il entreprend alors une thèse sous la direction de Jean Claude PECKER alors astronome à l’Observatoire de PARIS, sur un sujet quasiment vierge, l’astronomie infrarouge.
Après avoir soutenu sa thèse en 1969, ses activités de recherche ont largement contribué au développement d'une nouvelle branche de l'astronomie tournée vers l'observation des astres par leur rayonnement infrarouge, à l'aide de télescopes situés à la surface de la Terre, mais aussi à bord d'avions ou de satellites-observatoires.
« Il a développé de nouveaux outils, tournés tout particulièrement vers la production d'images de très grande résolution, appliquées à l'étude de la surface et de l'environnement d'étoiles jeunes ou évoluées, ainsi que du milieu interstellaire. Il a contribué à l'introduction de l'optique adaptative en astronomie, afin de corriger les effets délétères de l'atmosphère terrestre sur les observations, et formé de nombreux chercheurs dans ce domaine. » affirme sa biographie.
Il a fait ainsi progresser la connaissance de l’environnement solaire, des régions galactiques denses de formation d’étoiles et de certains objets proto-stellaires, mais sa contribution principale concerne le développement des outils de l’astronomie infrarouge.
 
2.2 Sa carrière
 
Devenu maître-assistant à ORSAY, il y demeure jusqu’en 1971 où il devient maître de conférence puis en 1973 Professeur à l’Université PARIS VII (maintenant PARIS DIDEROT) où il est aujourd’hui Professeur émérite. Il est devenu en 1969 chercheur associé à l'Observatoire de Paris et y a dirigé, de 1971 à 1983, le Laboratoire d'astronomie infrarouge en liaison avec le CNRS. Il a dirigé l’Ecole doctorale Astronomie et Astrophysique d’Ile-de-France entre 1995 et 2004. Il a été élu en 1991 membre de l'Académie des sciences.
Très engagé dans la rénovation de l’enseignement des sciences à l’école et au collège, il a été à l'origine avec Georges CHARPAK et Yves QUÉRÉ du programme éducatif La main à la pâte, méthode active d'initiation aux sciences dans les écoles primaires. Cela l’a conduit à être désigné par l’Académie des sciences pour y créer la Délégation à l’éducation et la formation et pour y occuper la fonction de délégué de 2005 à 2011.
 
2.3 Ses activités
 
2.3.1 Les débuts dans l'infrarouge.
 
Il faut d’abord trouver des détecteurs utilisables ! Les premiers travaux (1965-67- sur le Soleil utilisent une cellule de GOLAY* empruntée à l’ONERA. Les contacts pris avec la SAT à propos de ses détecteurs PbS montrent que ceux-ci ne sont pas utilisables dans l’infrarouge lointain.

Une cellule de GOLAY est un détecteur pneumatique constitué d’une chambre de quelques mm contenant un gaz à basse pression (0.1 à 1 mm de Hg) munie d’une fenêtre transmettant le rayonnement sur un film mince et absorbant qui s’échauffe ainsi que le gaz. La déformation d’une membrane métallisée est utilisée comme signal électrique.

Aux Etats-Unis où il séjourne pour terminer son doctorat d’Etat de 1966 à 1968, il utilise le premier bolomètre refroidi à l’hélium liquide (bolomètre de LOW) pour l’étude du Soleil, au sol d’abord (Observatoire de KITT PEAK), puis à bord d’un avion de la NASA (CONVAIR 990).

De retour en France, ses recherches se poursuivent à l'Observatoire de Paris, mais il participe à de nombreux projets au sein d’équipes multinationales impliquant de fréquents séjours dans divers observatoires du monde entier.
L’importance des résultats obtenus en Californie avec le CONVAIR 990 incite Pierre LÉNA à organiser des observations à partir de la CARAVELLE du Centre d’Essais en Vol, en dotant celle-ci d’un télescope embarqué de 32 cm, destiné à l’observation dans l’infrarouge lointain des zones de formation d’étoiles de la Galaxie.
Cette pratique de l’astronomie infrarouge aéroportée conduira l’équipe de l’Observatoire de Paris à proposer l’observation de l’éclipse solaire totale du 30 juin 1973 à bord du prototype Concorde 001, équipé d’un hublot optique dans le toit de la carlingue. C’est l’éclipse du siècle parce qu’elle se produit au moment du solstice d’été, ce qui est excessivement rare ! La moisson scientifique n’est pas considérable car le temps de préparation de l’expédition fut trop court, mais l’événement demeure un exploit du pilote, le rendez vous avec l’ombre s’étant produit à la seconde près.
 
 
Le décollage a lieu le 30 Juin 1973 de LAS PALMAS avec une équipe d’astronomes français, britanniques et américains. Il se dirige vers N'Djamena, au TCHAD, en restant dans l’alignement du Soleil et de la Lune. Volant à 18 000 mètres d’altitude et pratiquement à la vitesse maximale, André TURCAT, premier pilote d’essais du CONCORDE, réussit à maintenir l’avion pendant 74 minutes dans l’ombre totale portée de la Lune !
 
Ce télescope volera régulièrement, avec diverses collaborations européennes (Allememagne, Pays Bas notamment) entre 1973 et 1979. Il sera implanté, avec le concours du futur astronaute Claude NICOLLIER,  sur le CONVAIR  de la NASA, avant le désastreux crash de celui-ci en 1985, pour des missions de simulation des vols de la future navette spatiale faites dans le cadre de l'ESA.
 
La fin des années 1970 et les décennies suivantes verront les détecteurs infrarouge se perfectionner considérablement, avec l’apparition des détecteurs imageurs, formés d’une mosaïque bidimensionnelle de pixels, pour l’infrarouge proche (1-10 micromètres), les bolomètres demeurant pour longtemps encore l’outil de choix aux longueurs d’onde plus élevées. La collaboration avec la SAT et SOFRADIR, fut renouée par l’Observatoire de Paris dans les années 1980 et les premières mosaïques HgCdTe de fabrication française ont été utilisées sur un télescope dans la décennie 1980. Ces développements, poursuivis avec le LETI-LIR à Grenoble, conduisirent à proposer une caméra équipée de détecteurs français pour la mission du satellite ISO, lancé en 1995. Ils conduiront aussi aux premières observations astronomiques, historiques, en optique adaptative, réalisées en octobre 1989 à l’Observatoire de Haute-Provence, puis de façon intense à l’observatoire (ESO) de LA SILLA dans le désert d'ACATAMA au Chili.
C'est ce qui est détaillé dans les paragraphes suivants. 

 

 2.3.2  Les observations au sol 

Peu à peu on s’oriente vers des miroirs de plus en plus grand diamètre situés en des points où les perturbations apportées par notre atmosphère sont minimisées. Pierre LENA intervient alors dans le développement d’instruments d’observation. D’abord c’est au TCFH (Télescope Canada-France-Hawaï) de 3,60 m de diamètre, situé à 4200 m d’altitude au sommet du Mauna Kea un volcan endormi de l’ile d’Hawaï, mis en service. Puis il travaille au grand projet ESO (European Southern Observatory ou Observatoire Européen Austral) dont le projet en gestation depuis 1977, ne verra le jour qu’en 1987 pour aboutir à une mise en service progressive à partir de 1998. Le VLT (Very Large Telescope) comporte un télescope principal de 8,20 m de diamètre et quatre télescopes auxiliaires de 1,80 m pouvant être associés pour former un interféromètre optique géant.

Le VLT est installé au nord du Chili sur le Cerro Paranal (altitude 2635 m) qui fait partie de la chaîne côtière de la Cordillère. Ce lieu offre une couverture nuageuse quasi inexistante, l’altitude garantit une agitation atmosphérique faible tandis que la proximité de la mer (12 km) permet de minimiser la différence de température entre le sol et l’atmosphère. Enfin, l’éloignement des concentrations urbaines (Antofagasta à 130 km) évite les lumières parasites rayonnées ou réfractées, ainsi que la pollution de l’air.
Les faisceaux lumineux sont combinés à l'aide d'un système complexe de miroirs dans des tunnels souterrains où les chemins de lumière doivent être maintenue égaux à des distances inférieures à 1 / 1000 mm sur une centaine de mètres. Cette précision permet de reconstruire des images avec une résolution angulaire de l’ordre de la milliseconde d’arc, environ 20 fois meilleure que celle que permet un télescope individuel seul : elle permettrait de distinguer les deux phares d’une voiture à la distance de la lune !

 

Les relations qu’entretient depuis longtemps Pierre LENA avec Jean BESSON, patron du service de technologie, lui permettent de connaître l’existence de travaux concernant d'une part la réalisation de puces sur des « wafers » (technologies proches de celle des circuits intégrés dans le laboratoire de Pierre MORILLON à Dinan) et d'autre part la mise au point de circuits de lecture et de calibration dynamique des détecteurs fonctionnant à 77 °K capable de supprimer le « bruit spatial fixe » (laboratoire de Michel SIRIEIX à Cantagrel). Il est également en contact avec Jean Pierre CHATARD qui présente une thèse de Docteur Ingénieur sur ce sujet. Malheureusemen la classification secret défense ne permet pas d’envisager une véritable collaboration.
 
Pourtant, alors qu'il travaille dans le domaine de la combinaison d’images et de l’optique adaptative en vue de corriger les aberrations entrainées par l’atmosphère terrestre, poursuivant les travaux d’Antoine LABEYRIE (interférométrie des tavelures) qu’il s’efforce d’appliquer aux images infrarouges. Il prend alors de nouveaux contacts avec la SAT en vue d’utiliser les premières matrices bidimensionnelles de détecteurs infrarouges que celle-ci vient de développer. A la suite de longues et difficiles négociations, l’équipe de l’observatoire de Meudon reçoit l’habilitation nécessaire, et après sécurisation du laboratoire du CNRS, la première matrice 8x8 est mise en œuvre dans un laboratoire d’astronomie, puis transportée au pic du Midi pour réaliser les premières images d’étoiles. Cette première campagne permet alors de poursuivre l’expérimentation des techniques en cours de développement pour ces futurs observatoires.

 

Se procurer des matrices d’imagerie infra rouge à cette époque, n’est pas une chose facile. Les seules disponibles ont été développées, en France comme aux USA, pour des applications militaires. Elles font donc l’objet d’un classement « Secret Défense ». Michel SIRIEIX se souvient combien il fut difficile pour la SAT de convaincre les militaires d’accorder l’habilitation correspondante aux quelques personnes qui auraient à utiliser ces matrices. Il faut dire que les vêtements et les cheveux longs de ces jeunes universitaires (à l’allure « soixante-huitarde ») ne facilitaient pas les contacts avec les officiers de sécurité !

 

2.3.3  Les satellites

 

Entre temps, l’idée d’utiliser des télescopes embarqués à bord de satellite progresse. Les USA, la Grande Bretagne et les Pays-Bas développent le satellite IRAS (InfraRed Astronomical Satellite) finalement mis en orbite héliosynchrone début 1983.

Muni d’un miroir de 60 cm et d’une batterie de détecteurs dans les bandes de 12, 25, 60 et 100 μm refroidis dans l’hélium liquide à 2°K il réussit en dix mois, par balayage, une cartographie complète du ciel. Celui-ci découvre environ 350 000 sources de rayonnement infrarouge dont de nombreuses restent encore à identifier. Parmi celles-ci 75 000 environ sont probablement des galaxies en phase de formation soupçonnées d'être des étoiles ou des galaxies en cours de formation. La résolution angulaire obtenue s’échelonne de 0,5 minute d’arc à 2 minutes d'arc à 100 µm.


            Satellite IRAS

 

L'ESA et la communauté scientifique européenne projettent, un peu plus tard, un véritable observatoire infrarouge en orbite capable d'être "pointé" vers une zone choisie : c'est ISO (Infrared Space Observatory).


Equipé de caméras et de spectromètres couvrant la plage 2,5 à 240 μm, il fournit des images meilleures d’un facteur de 50 à 100 en résolution et de 1 000 en sensibilité. Lancé en 1995, il révolutionne, notre vision de l’Univers.

 

Satellite ISO                        ISOCAM

Là encore la SAT est mise à contribution : elle fournit vers 1985 les matrices de détecteurs de courte longueur d'onde. La technologie progressant, ce sont des matrices de taille 16x16 qui sont finalement livrées pour le modèle de vol et ses rechanges. Elles fonctionnèreny correctement pendant toute la durée de vie du satellite (environ 1,5 an).

Les détecteurs SAT au HgCdTe utilisés pour la plage entre 2,5 et 5,5 μm) fonctionnent à 4°K dans le boitier plan focal de la caméra infrarouge ISOCAM. Le CEA est maître d’œuvre de cette caméra et SOFRADIR fournit les circuits électroniques de lecture des détecteurs associés.Grace à ISOCAM, des percées spectaculaires sont réalisées dans l’étude du processus de formation des étoiles et d’évolution des galaxies. L’astronomie infrarouge a acquis sa maturité.

 
2.3.4  La voie est maintenant ouverte ...
 
Les études entreprises dès 1977 d’un grand télescope en orbite, aboutissent à la mise en orbite par la navette « Discovery », en 1990, du satellite « HUBBLE ». Celui-ci avec son miroir primaire de 2,40 m et ayant été équipé en 1997 de la caméra NICMOS (Near Infrared Camera & Multi-Object Sensor » a permis de valider de nombreuses hypothèses sur la composition et l’évolution de notre Univers :   
  • des planètes gravitent autour d'étoiles comme notre Terre autour du Soleil,
  • la matière sombre des galaxies n’est pas constituée uniquement de petites étoiles peu lumineuses,
 On notera que l’intérêt des images infrarouges est tel que les 105 kg de glace d’azote embarqués à bord pour refroidir les détecteurs à 77 °K étant évaporés fin 1999, il fut décidé de développer et installer à bord en 2002 une machine cryogénique capable de refroidir ceux-ci à une température voisine de 80 °K.
mais aussi d’en faire de nouvelles :

"HUBBLE" est par ailleurs concurrencé par d’autres satellites d’observation dans l’infrarouge :

 

  • “SPITZER” gros télescope infrarouge, lancé par la NASA en 2003, et couvrant la plage de 3 à 160 μm,
  •  "ASTRO-F" développé par l’agence spatiale japonaise (« JAXA ») et lancé en 2006,
  • "HERSCHEL" issu d’un programme de l'ESA, dont l’objectif scientifique est de faire des observations astronomiques dans les domaines de l’infrarouge lointain et du submillimétrique à partir de 80 µm, est équipé d’un miroir de 3,5 m de diamètre.

                                                                              Observatoire HUBBLE                                                            

Profitant du même lanceur Ariane 5, le satellite « PLANCK » de l’ESA est placé en orbite héliosynchrone en même temps que « HERSCHEL » en mai 2009. L’ensemble des deux satellites est destiné à traquer le rayonnement fossile de la toute première « lumière » de l’Univers appelé « bruit de fond cosmologique »" émise 380 000 ans après le « Big Bang », il y a plus de 13 milliards d’années ! L’univers était alors concentré dans un volume un milliard de fois plus faible qu’aujourd’hui. Afin d’observer ce rayonnement dont la température n’excède plus aujourd’hui 2,7  K et surtout pour dresser une carte ultra précise de ses infimes variations (± 1 10-5 °K). Dans ce but, « PLANCK » comprend un système de refroidissement à six étages (trois passifs et trois actifs) permettant de maintenir le miroir principal (1,50 m de diamètre) à 60 °K tandis que l’enceinte des détecteurs est à 20 °K. L’instrument LFI qui couvre 3 bandes entre 30 et 70 GHz a ses détecteurs maintenus à 20°K, tandis que les bolomètres de l’instrument HFI couvrant 6 bandes entre 100 et 860 GHz nécessitent une température de 0,1 °K ! Le dernier étage cryostatique utilise la dilution de deux isotopes de l’hélium.


                       ------------ HERSCHEL                                            PLANCK

Un autre satellite, finalement lancé en 2002 de BAÏKONOUR, avait précédé ces deux derniers, il s’agit du satellite « INTEGRAL »  ( INTErnational Gamma Ray Astrophysics Laboratory ) premier équipement capable d’observer des objets célestes simultanément par les rayons ?, les rayons X et la lumière visible qu’ils émettent puisque, l’atmosphère terrestre joue, heureusement, le rôle de bouclier, contre les plus durs.

Il vise principalement les violentes explosions générant des bouffées de rayons gamma, les phénomènes mettant en œuvre des énergies colossales tels que l’explosion d’une supernova mais aussi les régions de l’Univers soupçonnées de présenter des trous noirs.

La caméra principale ISGRI (Integral Soft Gamma Ray Imager) développée par le Service d’Astrophysique du CEA est chargée de fournir des images 128 x 128 dans le domaine d'énergie 20 keV à 10 MeV. Son plan de détection de 60 x 60 cm comporte 4 x 2 caméras totalement indépendantes.Elle est située à 3.2 m d'un masque codé, un écran constitué d'une mosaïque de lourds blocs de tungstène. Grâce à ce masque, la caméra ISGRI présente un pouvoir de résolution de 12 minutes d'arc et un champ de vue de 350 degrés carrés.
 

        Satellite INTEGRAL                           Caméras   et polycells

 

Chacune des 8 caméras est elle-même formée de 16 x8 = 128 microcaméras élémentaires ou « polycells » à 16 détecteurs individuels. Les détecteurs sont des cellules semi-conductrices de tellurure de cadmium (CdTe) dont l'intérêt, outre leur bonne efficacité de détection est de fournir une excellente résolution spectrale sans nécessiter de refroidissement. Elles ont été fournies et pré-assemblées par le laboratoire de la SAT à DINAN. Chaque point image (pixel) est un détecteur carré de 4 mm par 4 mm et de 2 mm d'épaisseur. Cette épaisseur permet d'assurer une efficacité de détection de 50% à 150 keV. L'électronique de traitement des informations réalisée à partir de puces étudiées par le LETI est relativement conventionnelle. Elle date les détections avec une précision de 60 ms qui permet l’analyse de l'émission des pulsars jusqu'à des périodes inférieures à la milliseconde.
 
2.3.5 autre implication de la SAT dans l'astronomie
 
Vers  1975, Bernard CHRISTOPHE et Michel SIRIEIX ont contribué, en compagnie de l’astronome Jean GAY, un ancien de l’observatoire de Meudon, à la réalisation, à Grasse, d’une expérience baptisée SOIRDETE (Synthèse d’Ouverture IR à DÉTEction hétérodyne).
Son principe consistait à utiliser la détection hétérodyne d’une étoile à 10,6µm. Deux télescopes distants d’une dizaine de mètres étaient équipés chacun d’un détecteur HgCdTe à large bande (2 GHz) qui recevait le rayonnement de l’étoile, un laser CO2 servait d’oscillateur commun pour la détection hétérodyne. Les signaux électriques recueillis à la sortie des détecteurs étaient amplifiés, additionnés et redressés. On obtenait ainsi avec le défilement de l’étoile des franges d’interférences qui permettaient de mesurer avec précision le diamètre angulaire de l’étoile.
 
 
2.3.6  et aujourd'hui ...
 
Aujourd’hui, les américains utilisent à l’observatoire de Hawaï et sur certains satellites des matrices IR de plusieurs millions de pixels dont les performances sont bien évidemment classifiées. Cela donne une idée du chemin parcouru depuis les travaux de pionniers entrepris à la SAT, il y a maintenant bien longtemps !
 
3 – Le message de Pierre LENA
 
Nous avions envoyé un message à Pierre LENA, dont nous savions qu’il avait été en relation avec la SAT, lui demandant s’il pouvait nous dire quels avaient été ses rapports avec la SAT et de nous en préciser les occasions.
Sa réponse mentionne les circonstances particulières de sa carrière telles qu’elles sont rapportées ci-dessus. Il mentionne que les relations, plus ou moins étroites selon les époques, avec les ingénieurs de la SAT, ont toujours été cordiales et fructueuses et l’on conduit, en plusieurs occasions, à envoyer ses élèves travailler avec SAT ou SOFRADIR, à propos des mosaïques de détecteurs, afin de préparer leur thèse.
Regrettant de ne pouvoir nous fournir plus de détails (dates, noms, etc..) il nous a adressé, en conclusion, ce petit compliment :
« En un mot, je puis dire que sans la SAT, nous autres astronomes français, nous serions sans doute découragés de dépendre totalement de produits américains vendus au compte-goutte et cher. Les dialogues conduits avec la SAT, la souplesse des autorités nous donnant accès aux technologies sensibles ont beaucoup fait pour que, dans l’histoire de la jeune astronomie infrarouge, les scientifiques français soient présents de façon plus qu’honorable, et je suis heureux de cette évocation dont vous me donnez ainsi l’occasion.
 
Il a bien voulu, par la suite, relire et corriger ce qui avait été écrit. Qu’il trouve, ici, les remerciements des anciens de la SAT.

 

 


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