Anecdotes

 

Le tableau ci-dessous liste les anecdotes recueillies lorsque nous avons pris contact avec les anciens dans l’intention d’écrire notre ouvrage de mémoire. Elles ont été regroupées par « auteurs » ou par sujets généraux. 
Pour accéder à ces anecdotes, repérez votre sujet d’intérêt dans le tableau puis cliquez dans la colonne « Accès » de la ligne correspondante. 
A la fin du texte relatant chaque anecdote vous trouverez une commande ( Retour ) permettant de revenir à ce tableau.

  

Repères
Sujet
Accès
A1
Quelques anecdotes extraites des souvenirs de Lucien TRAUB
A2
La SAT sous surveillance (Raymond MATHIEU)
A3
Les joies des "appros"  (Jean-Louis LAVOISARD)
A4
Souvenirs de Jean BESSON
A5
Souvenirs de Michel BUCHER
A6
Répliques sans réplique
A7
Souvenirs de Georges PLANTIER
A8
Souvenirs de Roger RUMEAU
A9
Comment nait une réputation  ( Claudie HEZEZ)
A10
Souvenirs de Jean TURCK
A11
Visite et portrait du Ministre
A12
Souvenirs de Claude GANDILLON
A13
E
C
A14
F
C
A15
G
C
A16
H
C
A17
I
C
 
  

Il est également possible de lire toutes les anecdotes en déroulant la page très longue qu’elles constituent ! 

o-o-o-o-o-o-o-o-o
A1 Quelques anecdotes extraites des souvenirs de Lucien TRAUB
 
1 – Quand « un tiens » vaut mieux que « deux tu l’auras »
 
De 1946 à 1949, la reconstruction puis l’extension du réseau téléphonique fournissait beaucoup de travail à la SAT où l’horaire de travail était de 45 heures par semaine.
En novembre 1947, la CGT déclencha une grève avec pour revendication essentielle une augmentation des salaires. La Direction proposa alors une augmentation « raisonnable » qui fut refusée par ce syndicat. La grève se poursuivit une semaine, deux semaines. Vers la fin de la troisième semaine, la Direction fit parvenir à chacun une lettre demandant de choisir entre la reprise du travail le lundi suivant à ses conditions ou la démission comme serait interprétée l’absence au poste de travail !
Le travail reprit effectivement ce lundi, mais l’augmentation de salaire accordée était notablement inférieure à l’augmentation proposée initialement ; l’explication étant le retard et les pertes causées par la grève.
Les salariés, mécontents de la CGT, se tournèrent alors en grand nombre vers FO, dont une section fut alors créée à l’initiative d’Etienne LAGET. 

2 – Les « illuminations » de Jean-Edouard COLIN
 
Notre « pape » du calcul des filtres racontait souvent que des êtres surnaturels se montraient à lui, la nuit, le chargeant de missions dans l’intérêt de la science ou de l’humanité. Un matin, il entra au laboratoire et déclara : « Messieurs, cette nuit, la Vierge m’est apparue ». Jacques GROLLEMUND qui ne manquait pas d’esprit, arrêta net la tirade qui allait suivre en s’esclaffant : « Elle ne devait plus l’être quand elle est partie ! » 

3 – De l’audace, encore de l’audace, toujours de l’audace
 
S’il y a quelqu’un qui ne manquait pas d’audace, à la SAT, c’était bien Myron LEBEDINSKI. Un jour accompagnant des visiteurs étrangers, il arrive à l’extrémité du laboratoire et désignant la porte des toilettes affirme ; « Au-delà nous avons d’autres laboratoires ». Questionnant un jour Jacques ROUSSEL du Service Technique, sur ce qu’il pense de l’avancement des études, il s’étonne : « Mais vous me dites aujourd’hui ce que je vous ai dit hier ! » Une autre fois, avec le fort accent russe dont-il ne se débarrassera jamais, il ironise : « Nous autres, Français, nous sommes vraiment frondeurs ! » 

4 - Attention aux mots utilisés 
 
Un jour, une dame devant déménager et classer de volumineux dossiers voulut demander l’aide d’un magasinier ; elle s’adressa au chef de ce dernier de la manière, un peu précieuse, suivante :
 
« Puis-je jouir de Monsieur SCHMITT ? » et reçut la réponse : « Oh, moi, je veux bien, mais à son âge ? »

Retour

 

 
 A2 La SAT sous surveillance (Raymond MATHIEU)  
 
A partir de 1941, la SAT fut autorisée à poursuivre certaines activités avec le personnel resté à Paris. Elles s’effectuaient sous la surveillance permanente d’un colonel allemand. Celui-ci avait travaillé chez FELTEN & GUILLAUME et connaissait bien, non seulement le domaine de la transmission téléphonique, mais aussi la SAT en raison de l’exploitation par celle-ci de licences concernant certains câbles et le frittage de ferrites. Il parlait un excellent français et n’était pas un nazi convaincu, comme en témoigne ce qui suit.
Chaque matin, Louis HENRY arrivait le premier ; quand l’allemand arrivait à son tour, il entrait dans le bureau de Louis HENRY qui le saluait : « Heil HITLER ! ». L’allemand, répondait systématiquement : « Assieds-toi et ferme ta gueule ! ».
Si la « surveillance » des travaux n’apportait pas vraiment de contrainte, le contrôle des commandes d’achats de composants et de matières premières était fondamental ! La poudre de fer était notamment un produit stratégique à cette époque. Louis HENRY avait prévenu M. BREUIL : « Vous pouvez vous tromper et demander plus que nécessaire, mais si l’allemand s’en aperçoit et le demande, je vous mettrais à la porte » (ce qu’il n’aurait pas fait, bien sûr ; il aurait sûrement trouvé une autre solution !)
Un jour M. BREUIL avait multiplié les besoins par 10. L’allemand examina la commande et dit : « Vous vous êtes trompé ! Ce n’est pas le chiffre que vous avez mis qui est le bon » et il doubla la commande finale !
 
 
Retour
 
A3 Les joies des appros (J-L LAVOISARD) 
 
 
1 – Les rondelles !
 
Un jour, ayant besoins de 8 rondelles "Grower", j'envoie un technicien les chercher à la Section 6. Le technicien revient en me disant qu'il n'y en a pas. Je téléphone et dois expliquer qu'il faut en commander car nous allons utiliser ces rondelles pour assurer un bon contact électrique entre des condensateurs électrolytiques et un châssis en aluminium. Le lendemain, on me dit que ces rondelles ne se vendent que par paquets de mille. Je réaffirme mon besoin et explique que nous aurons besoin de ces rondelles pour une présérie de quelques équipements à la suite du prototype en cours de montage.
J'ai reçu quelques jours plus tard ….8000 rondelles ! 
 
2 – Le « strip »
 
Pour pouvoir souder sans problème le fil émaillé de très faible diamètre des bobinages (inductances ou transformateurs), on utilisait au laboratoire une pâte adéquate qui attaquait rapidement l’émail. Ce produit se présentait en tube (de la capacité d’un tube de pâte dentifrice). Ayant épuisé tous les tubes du labo, je me vis obliger de passer la commande de quelques tubes de « strip » ! Une dizaine de jours plus tard, je reçus un fût de 50 litres de « strip » et dix cartons contenant chacun 100 tubes de 50 ml, vides, mais prêts à être remplis. L’erreur provenant du service achat, celui-ci, récupéra le tout et fit entreprendre le remplissage et la distribution dans les laboratoires et ateliers. Peut-être en restait-il encore quelque part lorsque j’ai quitté la SAT. 
 
3 – Le mercure
 
Un ingénieur ayant besoin d'assurer des contacts entre résonateurs à quartz métallisés, demande l'achat de 500 g de mercure. Comme le coût est important la commande passe pour approbation par la direction technique. On interroge l’utilisateur sur l'usage envisagé et on lui "réduit" sa commande à 250 cm3, soit près de 7 fois plus qu'il n’en avait demandé ! 
 
4 – Les cornières des bâtis PTT
 
La structure principale des bâtis était alors constituée de cornières d’acier utilisées en assez grand nombre. M. GILARDI, notre directeur industriel s’étonna pourtant, un jour, en constatant que la cour du 16, rue CANTAGREL est pleine de barres de fer, puis passant au dépôt d'IVRY que celui-ci est envahi par des barres du même type. Quelques jours plus tard, il vit des barres de fer (toujours les mêmes) en cours de livraison à CACHAN. On lui expliqua qu’il n’y avait plus assez de place ailleurs. Il se renseigna et constata que,normalement, les appros étaient prévus avec stock minimal déterminé ! L'origine du problème venait du fait que les besoins de l'atelier étaient exprimés en centimètres et les approvisionnements se faisaient en mètres !
 
5 – Les cotons-tiges
Et oui ! La SAT achetait des bâtonnets de cotons-tiges ! Ceux-ci étaient utilisés pour nettoyer la surface des cellules solaires après les opérations d’assemblages (mise en place de filtres interférentiels, assemblage, collage, interconnexion) des générateurs solaires de satellites. Ces cotons-tiges étaient livrés dans des boîtes en cartons de 200 et avaient fait l’objet de spécifications d’achat et de contrôle d’entrée.
Un jour l’atelier de montage des panneaux solaires, se trouva bloqué par manque de cotons-tiges. Une enquête rapide, permit de découvrir que la dernière livraison avait été refusée, lors du contrôle d’entrée, pour non-conformité. Les boîtes étaient de couleur bleue alors que la spécification indiquait (combien inutilement !) : boîte de couleur rose.
 
Retour
 
 
A4 Souvenirs de Jean BESSON
 
 
Après le rachat des Entreprises Jean TURCK, le laboratoire physico-chimique de CACHAN, travaillait au développement de ce qui allait être le premier « transistron » français, au germanium bien sûr, pour utilisation par les PTT. L’équipe dirigée par René DESCHAMPS comprenait des collaborateurs compétents qui travaillaient dans une ambiance assez déchainée. 
Lors de la mise en service de la première machine de tirage de cristaux de germanium, réalisée à partir d’une grosse perceuse sur pied, René DESCHAMPS, appelé pour l’inauguration, appuie sur l’interrupteur et alors retentit la sonnerie d’un cor de chasse ! Celui-ci a été malicieusement branché sur l’arrivée de l’air comprimé ! 
 
Pendant les « évènements » d’Algérie Robert PONET, le joyeux luron bourguignon, téléphone à un marchand de matériaux pour commander 10 mètres cubes de pavés à livrer aux établissements TURCK à Cachan :
 
« Quelle qualité, voulez-vous ? » demande le fournisseur.
 
« Aucune importance, c’est pour faire une barricade ! » obtient-il comme réponse !
 
 
 
 
1 - Les américains « bluffés » ! 
Bill était un officier supérieur de l'US NAVY qui gérait les études nouvelles confiées à l'industrie pour moderniser les navires de la flotte américaine. Un jour, il eut l'idée de contacter ses homologues français pour des échanges d'informations confidentielles sur les travaux en cours et futurs. La Marine ayant donné son accord, il se retrouva, un matin de 1981, à la SAT, avec quelques collègues, pour que l'on lui expose ce que nous faisions et projetions. Michel BUCHER fut chargé de lui présenter l'état de l'art et les projets en cours. Il insista sur les performances et le caractère novateur des équipements SAT, puis se proposa de répondre aux questions que nos hôtes voudraient poser. Il, n'y eut aucune question et personne ne fit la moindre remarque ! Après le déjeuner, ils partirent toujours sans faire le moindre commentaire. Après avoir visité d'autres entreprises, ils regagnèrent les USA en décidant d'établir des relations plus fréquentes avec la Marine française. 
Michel BUCHER eut l'occasion de revoir Bill à WASHINGTON et celui-ci l'invita à une « party» à l'américaine (costumes sombres ou smokings, robes longues et grands décolletés). Après l'absorption de beaucoup de whisky, la comparaison de vins de BORDEAUX et de Californie, Bill lui rappela sa première rencontre à la SAT. Michel BUCHER se permit alors de demander pourquoi, il n'y avait eu aucun commentaire et aucune question lors de cette visite. La réponse, en forme d'aveu, étonna beaucoup les présents : 
« Aujourd’hui, nous connaissons bien les navires français, nous avons navigué en Méditerranée et au large de la Bretagne, ils sont même venus chez nous, où nous avons simulé des attaques dans des conditions difficiles et à chaque fois nous avons pu vérifier les performances des équipements SAT ! 
Mais comprenez bien que lors de notre premier séjour en France, on nous a parlé d'équipements tellement impensables, que nous avons pensez qu'il s'agissait de « bluff» et que tels que vous les décriviez, ces équipements avaient peu de chance d'exister un jour. Aujourd'hui, les ingénieurs de l'US NAVY me disent que vous aviez au moins cinq ans d'avance sur nous.»
 
Cette fois, c'est du côté SAT qu'il n'y eut aucun commentaire, ni question !
 
 
 
2 - Ne serait-ce pas un K400 ? 
Après l'indépendance de l'Algérie, le champ de tir d'HAMMAGUIR n'étant plus disponible, pour les tirs de lanceurs civils et militaires, la France confia au CNES l'installation du champ de tir de KOUROU. Celui-ci lança un certain nombre d'appel d'offres internationaux pour l'équiper des moyens les plus modernes. La SAT proposa un équipement performant pour suivre la trajectoire initiale du premier étage, que le CNES nous demanda de monter sur une tourelle opto-mécanique de CONTRAVES qui savait réaliser d’excellents cinéthéodolites. L'équipement rapidement réalisé fut réceptionné et mis en service à KOUROU. Quelques temps après le CNES nous fit savoir que les performances étaient bonnes voire excellentes ; l'appareil « K400 » permettait de localiser un lanceur avec une précision de 5 m à 1.000 km !
 
La SAT fournit plusieurs pays étrangers, mais le gouvernement français interdit, c'était compréhensible, la vente à l'URSS. Or, après la chute du mûr de BERLIN et la « perestroïka », des journalistes français rapportèrent de nombreuses photos du champ de tir de BAÏKONOUR ; sur l'une d'elles nous avons pu identifier un objet en tout point semblable à notre équipement. Ne pensant pas qu'une fuite ou l'espionnage puisse en être à l'origine, nous ne pouvons penser qu'à un « transfert» par l'un de nos clients étrangers qui, pourtant, avaient été sérieusement mis en garde par notre gouvernement ! 
 
3 - Une époque révolue ?
 
 
Il fallait embaucher un technicien dans le laboratoire dont Michel BUCHER avait la responsabilité. Les réponses aux petites annonces, n'amenaient que des candidats qui ne lui semblaient ni compétents ni motivés. Enfin, un jour se présenta un candidat qui lui fit très bon effet, ; il lui dit alors que sa candidature est retenue mais que la décision finale appartient au chef du Département (Pierre LAMELOT).
 
Celui-ci fixa sur le champ un rendez-vous au candidat. Quelques jours plus tard, Michel BUCHER fut surpris d'apprendre que l'embauche était refusée. Pierre LAMELOT expliqua :« Quand il est venu me voir, il n'avait pas de cravate ! » BUCHER fut assez surpris sur le coup, puis comprit, peu à peu, quand ses confrères lui expliquèrent que présentation et marques de respect envers la hiérarchie étaient des manifestations nécessaires, voire des preuves, de l’application au travail et de la motivation d’un candidat à l’emploi dans la Société !
 
Y a-t-il, aujourd’hui beaucoup de candidats à un emploi de cadre qui portent une cravate lors d’un entretien d’embauche ? Combien savent-ils que cela peut être important ?
 
 
o-o-o
1 – Marc LIGER
Ingénieur, désirant changer d’activité et me faire embaucher par la SAT, je suis reçu successivement par Myron LEBEDINSKY, Jacques MARIE puis Léon PARCÉ. Ce dernier me demande  :
 
« Que savez-vous des télécommunications ? »
 
« Rien, mais j’apprendrai. »
Question suivante :
 
« Savez-vous l’anglais ? »
 
« Non, mais j’apprendrai. »
Je fus embauché sans autre discussion (1954)
o-o-o
2 – Marc LIGER
L’année suivante MM. PARCÉ, LEBEDINSKY et PLANTIER organisent un repas à ;’Aubergade de PONTCHARTRAIN dans le but de réunir les anciens et les nouveaux ingénieurs. Dernier arrivé, je suis chargé de tirer au sort les places occupées autour de la table. Le sort me désigne pour m’asseoir entre MM. PARCÉ et LEBEDINSKY. Ce dernier, qui possédait un poste de télévision, raconte qu’il a vu, au cours d’une récente émission, un prestidigitateur qui sait dire à chaque homme s’il porte une ceinture ou des bretelles. Je souris et déclare :
« C’est facile ! »
Myron LEBEDINSKY s’étonne alors :
« Etes-vous capable de dire si je porte une ceinture ou des bretelles ? »
Je réponds immédiatement : « Des bretelles ! »
« Comment le savez-vous ? » rétorque M. LEBEDINSKY.
« Vous avez une tête à ça ! » est ma réponse qui le laisse rêveur.
o-o-o
3 – Marc LIGER
Myron LEBEDINSKY m’ayant demandé de reproduire strictement une réalisation d’un autre constructeur, je fais une note proposant une autre solution qui me paraissait plus astucieuse. Il me convoque alors et me dit :
 
« Ce n’est pas ce que je vous ai demandé et je ne veux pas lire votre papier. »
Sortant du bureau, je dis à sa secrétaire, Mathilde LAGET :
 
« Notez que M. LEBEDINSKY a vu mon papier. Celui-ci est très bon et je m’en vais prendre l’air ! »
Croisant M. LEBEDINSKY le lendemain, je redoute un peu ce qu’il va me dire, et suis agréablement surpris par sa réponse :
 
« Faites ce que vous voulez. »
 
 
NDLR : Il n’était pas rare à la SAT que la direction, réagisse de cette manière, lorsqu’elle se trouvait en face de propositions sensées, soutenues par des ingénieurs compétents et décidés.
 
Il est vrai qu’à cette époque, le personnel était très motivé au travail pour la réussite de l’entreprise. Souvent, les projets avançaient, non comme l’avait décidé la direction, mais comme l’organisaient quelques ingénieurs « moteurs » qui demandaient aux personnes les plus compétentes dans chaque domaine de leurs « rendre service »e. Et chacun était souvent plus motivé pour rendre service que pour effectuer sa tâche « normale » !
 
o-o-o
4 - Jean-Louis LAVOISARD
Je suis convoqué un jour par le directeur technique Jacques BOULIN parce que j’ai fait trois changements successifs de valeur de composants pour des filtres à très basses fréquences fabriqués en présérie. J’explique les raisons qui m’ont amené à le faire :
 
« J’ai calculé et maquetté celui de la plage 7 à 10 Hz et celui de 15 à 20 kHz et j’ai interpolé pour les autres, il y a des petits ajustages nécessaires pour les fréquences intermédiaires ! »
M. BOULIN, me répond :
 
« Vous avez fait une erreur et un ingénieur ne doit jamais faire d’erreur, en tout cas pas à la SAT ! »
Comme j’ai déjà travaillé ailleurs et viens d’entrer à la SAT, ma réponse jaillit :
 
« Et bien monsieur, dans ces conditions, il vaut mieux que je parte tout de suite, car il est très rare que je ne fasse qu’une erreur par jour ! »
Il sourit, me demande d’être plus vigilant à l’avenir et dès les jours suivants cesse de convoquer systématiquement les auteurs de modifications sur les nouveaux équipements.
o-o-o
5 - Jean-Louis LAVOISARD
Pressenti par Jacques BOULIN pour partir à LANNION afin de diriger un nouveau laboratoire d’étude, j’ai répondu que je n’étais pas intéressé. Quelques semaines plus tard, il me convoque dans son bureau et me dit :
 
« Vos bureaux et le laboratoire sont prêts, quand pouvez-vous partir ? »
Je lui explique alors qu’il s’agit d’un malentendu, car je ne veux pas aller travailler à LANNION. Il tente alors de me convaincre et comme j’explique que je veux rester à Paris pour profiter de tous les spectacles offerts, il me dit :
 
« Mais enfin, vous n’allez pas aux Folies Bergères tous les soirs ! »
Je réponds alors, un peu poussé dans mes retranchements :
 
« Non, mais savoir que je pourrais le faire, fait partie de ma joie de vivre ! »
Le dialogue s’arrêta là, et un autre ingénieur parisien accepta de partir à LANNION.
 
 
NDLR : Quelques années plus tard Jacques BOULIN insista plus lourdement pour que Jean-Louis LAVOISARD aille à DOURDAN, ce qu’il accepta d’ailleurs. Parmi les arguments développés, Jacques BOULIN avançait que la bonne solution serait d’habiter à RAMBOUILLET et de venir à l’établissement de DOURDAN à cheval à travers la forêt ! Il y eut bien un grand parking, mais jamais d’écurie !
 
 
  
A7 Souvenirs de Georges PLANTIER

1 - L’arroseur arrosé

Alors que je travaillais aux PTT à la direction des Lignes Souterraines à Grande Distance, j’avais adressé à la SAT une lettre pour exprimer une plainte de cette administration concernant le retard de livraison de certains équipements.

Quelques jours après mon embauche à la SAT, fin 1954, un directeur me charge d’effectuer quelques tâches puis ajoute :

« Ah, et puis il y a cette lettre des PTT, à laquelle nous n’avons pas eu le temps de répondre. Ce serait bien que vous vous en occupiez ! »

C’était la lettre de plainte que j’avais envoyé moi-même et à laquelle il me fallut bien répondre après avoir glané quelques informations pour expliquer le retard !

2 – L’arithmétique grecque

Myron LEBEDINSKY désirant trouver sur place un représentant de la SAT et prendre contact avec l’Administration grecques des télécommunications était arrivé à ATHÈNES sans avoir trouvé un hôtel disponible. Il avait finalement échoué dans un hôtel assez minable.

Dès le lendemain, un dénommé Panos SAVIDES l’appelle à son hôtel et lui propose d’être le représentant de la SAT. Après discussion, pour preuve de son efficacité, il trouve une chambre à l’Athéna Palace (le meilleur «5 étoiles » d’ATHÈNES à cette époque) et organise un rendez-vous avec le Directeur Général des Télécommunications.

Cet homme était d’une grande habileté dans les négociations et je me souviens d’une discussion assez dure justement avec le Directeur Général des Télécommunications qui affirmait que la dernière proposition de la SAT était intéressante mais que le nouveau prix présentait une hausse de 25 % inacceptable. Il aurait voulu payé 100 alors que notre prix était 125. Comme il confiait que 20 % de hausse seulement lui paraissait acceptable, SAVIDES poursuivit la discussion en grec, expliquant, nous le sûmes plus tard, que l’augmentation du coût n’était pas de 25 % mais bel et bien de 20 % donc était acceptable, en effet 100/125 = 0,8 !

La discussion s’interrompit et le Directeur Général des Télécommunications déclara, en français :

« Ah, c’est vrai cela ne fait que 20 % ! » 

 Retour

A8 Souvenirs de Roger RUMEAU

 
1 – Humour froid
Quelques temps après mon arrivée à la SAT en 1965, Léon PARCÉ, le directeur général, qui aimait connaître tous les ingénieurs, me fit appeler dans son bureau. J’entre et me place du côté où on me l’a recommandé pour compenser sa demi-surdité. Il me demande :
« Combien de galons avez-vous dans le Génie Maritime ? »
Je réponds : « Cinq panachés »
« Et bien, me répond il avec l’humour qu’il pratiquait volontiers, j’ai un très mauvais fil pour coudre les galons, pour les prochains, il faudra le faire vous-même ! »
 
2 - Curieux voisinage
Lorsque la SAT recevait des officiers ou des ingénieurs de l’Armement, on leur faisait visiter les installations parisiennes : 41, 32 et on finissait généralement par le 16 qui jouxtait le fameux bâtiment du célèbre architecte LE CORBUSIER. Il se trouvait alors toujours quelqu’un pour commenter ce voisinage :
« A côté, c’est l’Armée du salut, ici, c’est le salut de l’armée ! »
Mais parfois aussi, des craintes se faisaient jour :
« Si cela continue, nous finirons tous à côté ! »
 
3 – Olympiades
J’ai oublié qui en fut l’initiateur, mais l’habitude fut prise d’organiser des jeux olympiques entre tous les établissements de la SAT. Ceux de POITIERS en furent l’apothéose : plus de 800 personnes concoururent pendant deux jours dans de multiples disciplines. Ce fut vraiment un exploit pour M. GAUTHIER de loger tout ce monde …. A l’exception des gens des Chantiers, grands experts en nomadisme, qui déclinèrent toute aide. Imaginez l’ambiance du dîner le premier soir dans l’immense salle qu’il avait fallu trouver (le Futuroscope, n’existait pas encore à cette époque).
Dieu, que les épreuves du lendemain furent difficiles !
 
Retour
 
A9 Comment nait une réputation ! (Claudie HEZEZ)
 
 
J’ai déjà raconté pour le « Livre de CANTAGREL » comment, en raison de ma facilité à converser en anglais, je m’étais trouvée impliquée dans l’accueil de deux officiers des Emirats Arabes Unis. Pendant 3 mois, ils devaient effectuer un stage technique la SAT et l’on m’avait demandé d’organiser et faciliter leur séjour ! J'avais suggéré de leur louer un studio ; pour moi, c'était moins impersonnel qu'une chambre d'hôtel. Je leur ai donc loué à chacun un studio dans une résidence à Montmartre avec l’accord de leur ambassade. Le midi ils mangeaient à la cantine avec André FONTAINE et le soir ils faisaient un repas léger dans leur studio.
 
 
Tous les samedis et dimanches nous passions la journée ensemble et je leur faisais visiter PARIS et les environs ; ils étaient très curieux sur tout ce qui concernait la France et quelque fois me posaient des colles sur tel ou telle chose. Le midi nous mangions au restaurant, très souvent des restaurants à cuisine française, ils appréciaient beaucoup et ont même voulu manger des escargots.
 
 
Un jour ils m’ont dit, assez timidement, qu’ils aimeraient voir un appartement français et manger un repas typiquement français, je les ai donc invités, un jeudi soir, et conduit jusqu’à chez moi à la sortie du travail à la SAT.
 
 
J’avais préparé, la veille, une blanquette de veau et fait une tarte, je ne me souviens plus à quoi, du reste. Par contre ils mourraient d’envie d’essayer du vin mais leurs principe religieux ont été plus forts que leur envie. Nous avons passé une très bonne soirée. A la fin du repas ils m’ont demandé, s’ils pouvaient faire leur prière. Leur ayant dit qu’il n’y avait aucun problème , ils sont passés par la salle de bain pour faire leurs ablutions puis ont sortis leur boussole pour trouver la direction de LA MECQUE.
 
Tandis qu’ils s’installaient tournés vers la porte du placard de ma salle de séjour, je les ai laissés seuls et ils ont commence leur prières à haute voix. J’avais l'habitude car ils m'avaient demandé très souvent à faire leur prière dans des endroits assez insolites, comme le zoo de SAINT VRAIN, BEAUBOURG, le parc du château de FONTAINEBLEAU ou même DISNEYLAND !
 
 
Une voisine a sonné à ce moment à ma porte pour me demander je ne sais plus quoi ; entendant des voix étranges, elle me demanda quelle chaîne de télévision, je regardai. Je lui ai répondu :
 
« Aucune, ce sont des clients qui font leurs prières ! »
 
A sa tête, je compris immédiatement qu’elle avait mal interprété ma réponse et je me suis empressée d’ajouter un peu confuse : 
« Non ce sont des clients de la société où je travaille. » 
D'un air sceptique elle me dit : 
« Ah bon ! » 
La dessus, Ali est venu me dire qu’ils avaient fini leurs prières et que la dame pouvait entrer ; ce qui provoqua immédiatement un nouveau commentaire de la voisine : 
« Et en plus ils ne parlent même pas français ! » 
 
La voisine partie, j’avais une envie irrésistible de rire à la pensée de la tête qu’elle avait faite ; mais je ne pouvais tout même pas raconter cet incident si cocasse à Ali et Ahmed ! Le lendemain au bureau lorsque j’ai raconté mon histoire, ça a été le fou rire complet. Au moins mes collègues ont bien ri de ma mésaventure.
 
Par la suite, j’ai revu cette voisine, mais elle ne m’a plus jamais adressé la parole ! 
 
Voilà comment se bâtit une réputation !

 Retour

 

A10 Souvenirs de Jean TURCK
Le NIAG (NATO Industrial Advisory Group), était un groupe au sein duquel les Industriels de l’Armement des pays occidentaux échangeaient des informations sur les études en cours, les difficultés rencontrées et les résultats obtenus. Il était très intéressant d’y participer pour savoir ce qui se préparait ailleurs, recueillir des informations techniques utiles. Même si la récolte d’informations « positives » restait limitée, la connaissance des échecs pouvait éviter d’engager les études dans de mauvaises directions !
Bien entendu, les militaires de chaque nation tentaient de ne pas dévoiler les projets les plus « nouveaux » et se montraient peu bavards afin de préserver ce qui constituait leur « avance ».
Jean TURCK, qui représentait la SAT dans ce groupe fut invité, en 1965, à une visite des Laboratoires de Recherche Fondamentale de l’US Navy. On lui fit alors un exposé relativement intéressant sur les recherches du passé, comme celle qui avaient permis le perfectionnement des fusées de proximité qui jouèrent un rôle fondamental dans la guerre du Pacifique, mais qui devint tout à fait simplet en ce qui concernait les études en cours.
Avant l’heure du déjeuner, pour meubler le temps, on lui proposa de visiter le « musée » du Laboratoire. Il vit alors dans une vitrine un détecteur, provenant des Etablissements Jean TURCK, qui datait d’une dizaine d’années et était présenté comme ayant rendu de grands services. Le présentateur, lui fait alors remarquer qu’il s’agit sans doute d’un homonyme. Alors Jean TURCK répondit : « Bien sûr, c’est moi qui vous l’ai fourni ce détecteur ! »
La séance d’exposés de l’après midi fut beaucoup plus sérieuse et des études avancées, en cours, furent décrites.
Retour

 

  A11La visite et le portrait du Ministre !

En 1966, à l'invitation de Louis HENRY, Pierre MESSMER, Ministre de la Défense vient visiter la SAT, et plus particulièrement les activités liées à la Défense. Le circuit de la visite est soigneusement préparé. Quelques travaux de réfection de peinture sont effectués. Mais la SAT manifeste, en raison de l'origine auvergnate de certains de ses dirigeants, un souci d'économie très ancré. Les contremarches des escaliers sur le circuit de la visite sont repeints, quand le ministre sera appelé à monter, mais laissés en l'état, quand l'escalier sera emprunté à la descente !
Les premiers travaux sur l'imagerie infrarouge sont présentés au ministre. A l'issue du déjeuner, un ingénieur prend l'Initiative d'effectuer une prise de vue infrarouge du siège qui avait été occupé par Pierre MESSMER et, se dépêchant d'en faire un développement, le lui offre. Cette initiative, non programmée, ravit le ministre qui fait encadrer l'image et l'affiche dans son bureau ministériel.
 
Plus tard, aux visiteurs qui lui demandaient ce qu'elle représentait, il l'expliquait très crûment. 
 
 
Retour
 
A12 Souvenirs de Claude GANDILLON
 
1- Le piège part en fumée . . .
 
Dans mes débuts à la SAT, on utilisait des prolongateurs dits "rallonges" qui disparaissaient mystérieusement.
Un jour, excédé, je décidai de piéger une de ces rallonges en reliant les deux conducteurs à la même borne de la prise femelle.
Il ne s'est rien passé pendant un certain temps jusqu'à ce qu'un certain Claude DEJEAN la branche sur le secteur.
Contrairement à ce que je pensais, le disjoncteur n'a pas fonctionné et le cordon, dont l’isolant, à l'époque, était en caoutchouc, a dégagé un épais nuage de fumée noire. Très surpris, DEJEAN n'a pas eu le temps de réagir avant que le cordon n'ait complètement fondu...
DEJEAN ne s’aperçut pas du piège, personne ne sut qu’il «empruntait » mes rallonges, mais tout le monde fut . . . enfumé ! 
 
2- Premier avril « suédois » !
C'était un premier avril. Dans ces temps reculés, on avait l'habitude, ce jour-là, de faire quelques plaisanteries appelées "poisson d'avril". Nous fabriquions, à cette époque, le codeur de télémesure du satellite TD1 de l’ESRO, qui nous avait été commandé par SAAB Electronic une firme suédoise basée à GOTEBORG. Des ingénieurs suédois devaient venir effectuer quelques contrôles et malheureusement, comme c’était assez souvent le cas, nous n'étions pas prêts...
En déguisant ma voix, j'appelai Yves CASTANET, en me faisant passer pour l’un des gardiens de la loge d’entrée du 41 et lui dis que les suédois le demandaient.
En revenant discrètement à ma place, je croisai CASTANET, tout excité qui me dit « Les suédois sont là, c'est une catastrophe ! »
Dans l'escalier qui le menait à la loge, il croisa Jean-Louis LAVOISARD, l’ingénieur responsable de ce projet à qui il expliqua l'affaire. « Ne vous en faites pas, j'y vais" répondit crânement ce dernier.
De retour au labo CASTANET me dit : « J'ai croisé LAVOISARD qui s'occupe des suédois ! » Je lui révélai alors ma supercherie et le poisson d’avril que j’avais préparé. Nous nous sommes réjouis de ce bon tour en nous promettant de ne pas nous en vanter.
Nous n’avons pas su comment s’était déroulée la suite des évènements et LAVOISARD ne sembla pas du tout perturbé lorsqu’il revint à l’atelier spatial !
Lorsque, beaucoup plus tard, je lui ai raconté cette anecdote, il m’a dit ne plus se souvenir de cet « incident ». Le poisson lui est-il paru aussi évident et anodin au milieu de tous nos problèmes de l’époque ou sa mémoire lui a-t-elle fait défaut ?
 
 
 
Retour
 

Dernière modification : 08.08.2014