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Contribution de N°06 - Yves CHABLE

 N.D.L.R. : Yves CHABLE a publié, chez MASSON en 1993, un livre concernant "Les circuits hybrides à couches épaisses" puis, en 2005 chez AMALTHÉE, un petit recueil de ses aventures en internat, dans la marine puis ....à la SAT. En voici, ci-dessous, quelques extraits.

 

 

Retour sur le plancher des vaches
Les plus belles aventures ont une fin, et la navigation sur la grande bleue n’était pas rose tous les jours. Certains aspiraient, après quelques années de bourlingage, à ne plus rouler, ne plus tanguer, et toucher un port d’attache définitif. Ainsi, ils posèrent sac à terre et entamèrent une nouvelle carrière.
Les entreprises terrestres sont plutôt sérieuses, pas souvent des lieux de chahut ou de plaisanteries ; toutefois, il peut s’en produire de temps à autre.
Dans un bureau d’ingénieur, le tableau possédait bien une rigole pour déposer les craies, mais rien pour le chiffon qui était, en fait, une éponge. L’occupant avait trouvé astucieux d’accrocher cette éponge à un clou planté dans le mur. L’objet paraissait ainsi collé contre la paroi, ce qui conduisit un collègue mal intentionné à le coller vraiment en position avec de la colle forte.
Bonne plaisanterie qui fit bien rire l’étage ; quelques jours passèrent avec, en apparence, la même position de l’éponge. Lors d’une réunion dans ce bureau, le Chef de Service du Personnel (désormais appelé Directeur des Ressources Humaines), vint à passer impromptu ; voyant cette éponge tenant miraculeusement sur le mur, il ne put s’empêcher de l’enlever pour comprendre. Il découvrit alors la face cachée qui portait un rectangle de papier avec l’inscription à l’origine destinée aux plaisantins : « JE VOUS EMMERDE ». Après un sourire un peu crispé, il quitta rapidement les lieux.
Dans le même genre de farce, à enchaînements imprévisibles et à résultat démultiplié, une autre plaisanterie eut pour cible un autre collègue, chauve, qui ne se déplaçait entre les différents bâtiments de l’entreprise qu’avec son chapeau.
Il se trouvait en réunion dans un Service d’Etudes lorsque l’on réussit à l’entraîner dans la visite d’un laboratoire. Pendant son absence de la salle, un petit malin se mit à remplir de petits confettis de perforatrice la zone du chapeau comprise entre la paroi intérieure du dôme et la bande interne de cuir. Après la réunion, il se rendit à une convocation du Directeur Industriel ; arrivé dans ce bureau, il fut invité à s’asseoir. Il prit place dans un siège et posa sur une autre chaise proche, son chapeau, ouverture vers le haut puis deux dossiers par-dessus. Il n’en vit rien, mais les confettis descendirent au fond du chapeau. Après avoir exposé son premier sujet, il reposa le dossier traité sur le bureau du Directeur et, simultanément, prit son deuxième dossier sur ses genoux tandis qu’il posait le chapeau, dôme vers le haut sur le premier dossier.
Quand il prit congé, et son chapeau, une nuée de confettis apparut, à l’ahurissement tant du Directeur que de notre pauvre ami qui, se confondant en excuses, dut balayer le bureau de toutes ces rondelles.
Ce chauve était devenu souffre-douleur. Lors d’une visite dans un établissement de province, on lui fit visiter les sous-sols contenant diverses installations de traitement des eaux. Le parcours nécessitait le port obligatoire d’un casque. Le fond du sien avait été muni d’un produit à base de nitrate d’argent selon un dessin bien délimité. Pour être certain du résultat, on avait à plusieurs reprises bien enfoncé le couvre chef sur la tête du chauve.
Juste après la visite, le crâne ne présentait aucun signe car, comme chacun sait, l’action de la lumière est nécessaire pour voir le produit noircir. Effectivement, dès le début de l’après-midi, une tache commença à apparaître et, en fin de journée, on voyait distinctement une tête de mort sur l’aérodrome à mouches.
Le « tatoué du ciboulot » repartit à Paris où beaucoup de ses collègues lui demandèrent ce qui lui était arrivé : la marque, qui subsista une bonne semaine, restait parfaitement visible sur un « fond » devenu rouge à cause des tentatives infructueuses de nettoyage à la pierre ponce.

 


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